En tant que DRH, j’ai eu à accompagner le déménagement d’environ 5000 personnes vers un site situé en banlieue parisienne, où devaient être regroupés des services éparpillés jusque-là dans Paris. Sur le plan fonctionnel et organisationnel donc, un changement plutôt positif puisque créant des facilités de travail sur le même site, de communication inter-services, de gain de temps et, même d’image. Cependant, le personnel, les syndicats, certains cadres même top niveau se sont montrés très réservés, tant un changement d’habitude, qui de plus impacte le temps de transport, créé par nature un refus et un stress.
La première opération a été de convaincre l’encadrement, à tous niveaux, du bien-fondé d’une telle décision, dont la mise en œuvre a été suivie au niveau du COMEX avec une implication très forte du grand patron. Mais le top down n’a qu’un temps, et il faut en parallèle associer et convaincre tous les niveaux de la hiérarchie, au minimum que ce n’est pas la fin du monde ni un PSE, mais un changement de lieu de travail avec des avantages (beaucoup) et quelques inconvénients.
Afin d’éviter des effets silos et une trop grande perte de temps, il a été décidé de mettre en place un groupe de réflexion et de suivi, présidé par un de mes proches collaborateurs (pas moi, à chaque fois, même si je venais faire l’ouverture de certaines séances, afin de me conserver une possibilité d’arbitrage) : ce groupe comprenait 3 personnes (et pas plus) de chacune des 6 directions de la structure, nécessairement un cadre supérieur, un cadre intermédiaire et un employé, volontaires si possibles, sinon désignés par leur structure. Chaque structure, à son niveau, devait relayer les résultats de ce groupe et le COMEX était tenu informé chaque mois des avancées et des difficultés éventuelles.
Et les syndicats ? Bien entendu, ils s’étaient mobilisés très vite et il fallait traiter avec eux ; après avoir hésité à les impliquer dans le groupe précédent, j’ai opté pour un traitement séparé, d’autant qu’ils appréciaient modérément que nous puissions parler de ce dossier directement avec des représentants du personnel. J’ai présidé personnellement les réunions avec les syndicats, afin de garder la main et d’éviter tout risque de demandes ou de promesses inconsidérées.
L’un des points importants et qui contribue à la crédibilité et à la détente est l’information. Il ne faut pas en effet confondre annonce et information (l’annonce ne suffit pas, il faut accompagner dans le temps) : nous avons créé un site électronique dédié accessible à tous, personnel et syndicats, qui permettait de passer l’information et de préparer les phases importantes (déménagement notamment). Ce site comportait une FAQ.
Il faut également répondre de façon claire à certaines questions, afin de démythifier certaines idées fausses. C’est ainsi qu’un examen des fichiers m’a permis de montrer que 50 % des agents étaient gagnants en temps de transport, ce qui permet de remettre « certaines pendules à l’heure ».
De même, j’ai pris le risque d’organiser très tôt des visites sur place, y compris avec les syndicats, avant même que les travaux ne soient terminés, et tant le personnel que les syndicats m’en ont su gré.
Bien entendu, il ne faut pas refuser d’examiner si des contreparties sont possibles, mais en restant réaliste. J’ai ainsi refusé catégoriquement la création d’une prime, demandée par les syndicats, liée au déménagement sur ce site, car rien ne la justifiait sur le plan des contraintes financières et de telles réponses s’avèrent contre-productives dans le temps le jour où les « anciens » perçoivent ladite prime, et les « nouveaux » ne la perçoivent pas.
A contrario, nous sommes convenus de mesure de confort : mise en place de l’horaire variable (contre l’avis de mes collègues qui craignaient une désorganisation des services, conciergerie, DAB, marchand de journaux, 3 cantines de niveaux différentes, installations sportives), et le summum, nous avons même obtenu du STIF le détournement de 2 lignes bus pour desservir au plus près les portes du site.
Enfin, une fois l’opération terminée, on peut maintenir quelques temps les groupes, mais il faut avoir s’arrêter et entrer dans sa nouvelle vie, afin d’éviter que tout nouveau problème ne soit rattaché à cette opération.
René Picon-Dupré
Ancien DRH au ministère de la Défense
Membre d’honneur du comité de pilotage et d’organisation du Club DéciDRH
DéciDRH est un club de Décideurs RH, en majorité des DRH mais aussi des RRH, responsables du développement RH, des responsables formation, recrutement, etc… Tout au long de l’année, nous proposons des opportunités de rencontres et de networking. Nous offrons à nos 100 membres des occasions uniques pour s’informer et se divertir.
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