Interview donnée par Christophe Leparq, directeur de l’agence à FormaRadio pour l’AFFEN, par Stéphane Diebold
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Bonjour à toutes, bonjour à tous ! Bienvenue à Affen & Co, la collégiale de l’Affen. Nous en sommes au numéro 245. Et aujourd’hui, on continue notre voyage, notre odyssée dans l’écosystème de la formation avec des hotspots, des structures qui existent et qui font des belles choses. Et je voulais aborder une structure que j’avais appréciée très fortement dès le démarrage. D’abord parce que c’est son fondateur que j’appréciais, parce que les associations sont souvent liées à ceux qui les créent : Christophe Leparq, qui a monté décidRH, qui est un espace qui justement est un peu plus large que la formation, mais qui est un espace quand même fortement centré sur la formation. Et ce que j’ai adoré, en plus du personnage, c’est que c’est un des grands spécialistes du marketing de la formation. Et donc pour ça, on a la chance de l’accueillir. Bonsoir Christophe !
Bonsoir Stéphane et merci de l’invitation !
Nous allons de suite commencer. Pourquoi avoir créé décidRH alors qu’il y a déjà d’autres structures ?
C’est une histoire un peu rigolote, parce que c’est l’histoire du mec qui ne voulait pas créer un énième club de décideurs RH et qui l’a quand même fait !
J’avais débuté ma carrière en 1995 dans une société qui s’appelait ADHESION et je m’occupais plus spécifiquement des événements qui avaient trait aux Ressources Humaines et à la formation. A l’époque c’était les TOP DRH, TOP RF, STRATEGIE FORMATION… et puis à partir de 2000, les premières éditions du congrès HR. Et puis ensuite, je suis parti dans un cabinet d’actuaires conseil en protection sociale. J’ai toujours eu le gout de l’intermédiation, donc à cette occasion j’ai créé un club de Comp & Ben, de responsables rémunération et avantages sociaux. J’ai pu m’aguerrir à cette spécificité des Ressources Humaines.
Et puis c’est aussi lors de cette expérience, aux vues des jeux de la table des relations sociales où parfois ils se négociaient des sujets importants que j’ai considéré que parfois ils pêchaient d’ouverture sur la visibilité du corps social dans sa globalité. Et c’était vraiment la typologie de personnes qui étaient autour de la table des relations sociales qui faisait qu’on allait mettre en place des choses pour l’ensemble des collaborateurs. Et du coup, moi qui cherchait mon idée entrepreneuriale, je me suis dit « ça y’est, je sais ce que je vais faire, je vais lancer la première agence conseil en MARKETING RH, vraiment au sens de faire appliquer des techniques de marketing aux Directions des Ressources Humaines.
C’était à quelle époque ?
C’était en 2006 ! Et donc, au début, forcément, on était un peu en avance sur le marché.
Bien sûr ! En sachant que le 1e événement sur le marketing RH a eu lieu en 2001… c’était vraiment le tout début, et le marché n’était pas encore prêt à cette époque là.
Tout à fait, ce n’était pas encore mature. Au début, on avait pas trop de missions. Et mon passé me rattrapait, et on me demandait d’organiser des événements pour que les DRH se rencontrent, ce que je faisais bien volontiers. Et ça plaisait, et on me disait : « Tu veux pas monter un club ? » Au départ, je dis « non, il y en a tellement sur la planète », il n’y a pas trop de légitimité. Et puis à un moment où on avait pas trop d’activités, je me suis dit on va quand même lancer une enquête en tant que marketer, pour savoir s’il y a la place pour un énième club de DRH. Lors de la phase quali, j’étais vraiment impressionné de voir l’accueil qui nous était réservé. Et puis les résultats de l’enquête ont montré qu’il y avait une petite place à se faire, un peu compliquée, mais qui ont fondé l’ADN de décidRH. Et donc ces velléités c’était :
1/ d’être préservé de la pression commerciale des vilains EXPERTS que nous sommes, parce qu’ils se sentent un peu victimisés quand ils participent à un événements du fait qu’il y ait trop de consultants aux vues du nombre de décideurs. Ils sont un peu victimes de cette chasse aux décideurs.
2/ ils ne voulaient pas de journalistes, pour que les propos soient aussi libres. Dans l’histoire du club, on l’a parfois regretté parce que ça nous a privé d’une certaine visibilité. Mais on a respecté ce principe.
3/ de faire preuve de créativité dans la sollicitation des intervenants pour qu’il y ait de la diversité. Il n’y a pas que le CAC 40 qui a le secret des réussites, il faut voir ce qui se passe dans les organisations, les start-ups…
Et c’est toutes les boites qui sont venues ? ou principalement des grosses boites ?
Un petit peu de tout ! Et surtout, on a réussi quelque chose qui était assez innovant à l’époque, c’était d’avoir la participation de décideurs RH de la fonction publique, y compris la fonction publique hospitalière, les armées, la fonction publique territoriale. Du coup, ça permet de développer, de voir des contraintes qui vont faire que certaines organisations vont exceller dans certains domaines. Dans la fonction publique, par exemple, tout ce qui est GPEC, ça fait longtemps qu’ils en font ! Il y avait à apprendre les uns des autres, avec les différences qui faisaient que l’on pouvait exacerber certaines qualités.
Alors aujourd’hui, qu’est ce qui se passe dans décidRH ?
On a une gouvernance qu’on appelle le comité de pilotage, avec une dizaine de membres qui représentent un peu tous les secteurs d’activités : du CAC 40, des PME, mais aussi des hôpitaux, des coopératives, des DRH de la fonction territoriale. Et avec eux, on construit notre programme, sur l’année et les années à venir. On a eu des personnes assez charismatiques en tant que Président de décidRH, qui porte le drapeau. Le premier, c’était Eric Bachellereau, quand il était DRH de Thompson ; ensuite, c’était Jean-Luc Vergne, quand il était DRH de PSA. Ensuite, on a eu Olivier Lajous, qui a marqué son époque quand il était DRH de la Marine Nationale et qui a eu le Prix du DRH de l’année (ça nous a fait beaucoup de bien !). Ensuite, Dominique Bellos qui était la DRH du groupe Hutchinson. Puis Thierry Billion qui était le secrétaire général de CMA-CGM. Et là, c’est Cécile Tricon-Bossard, qui est la DRH du groupe Natixis qui a pris la présidence en fin d’année dernière.
Ensemble, on construit le programme de nos heureux événements, toujours avec ce petit ADN d’agitateurs d’idées, où on essaye de sortir des sentiers battus. Tout ça avec des rythmes différents : des colloques sur 1 journée avec une thématique…
Combien vous en faites dans l’année ?
Des colloques, on en fait un par trimestre. En temps normal… là, la crise sanitaire nous a un peu empêché. Et puis de la même façon, on fait des soirées ludico-apprenantes. On a fait une soirée « moche » !
Quand on invite quelqu’un c’est étrange !
Voila ! Mais lors de cette soirée « moche », le sujet était pour le coup sérieux puisqu’on était sur la tyrannie des apparences. On a fait une soirée « Cinéma & RH » dernièrement aussi, où la Fondation Gan expliquait comment, grâce au cinéma, ils arrivaient à remettre du débat au sein même de l’organisation employeur, ce qui manque un peu parfois.
Exactement ! J’avais vu aussi la soirée « Casino », « Jockey » je crois aussi. Donc il y a plein de choses passionnantes !
La soirée originelle de la fondation de décidRH, c’était en 2007 pendant la Coupe du Monde de Rugby : on a fait en octobre une soirée « Rugby & RH », sur les valeurs. C’était un peu mon coup d’essai, les personnes participaient ou pas… et puis on avait connu le succès. Donc ça a lancé l’aventure !
Très bien ! Parce que c’est aussi un prétexte pour aborder un sujet, pour le connaître et ça permet par analogie de voir un peu ce qu’on peut en faire derrière. Et aujourd’hui, comment ça se passe avec le confinement ?
On a organisé notre dernier événement en présentiel avant le confinement au mois de juillet 2020, et c’était justement sur les changements de paradigmes au travail. On l’a organisé à La Défense. Et là on est revenu avec un événement au mois de novembre à Lyon, qui sont nos Rencontres d’automne où on organise des ateliers thématiques, pour le coup très opérationnels, très pratico-pratiques, où on met sur scène des duos expert / client qui vont expliquer comment ils ont travaillé ensemble.
Alors pour adhérer… est-ce que tout le monde peut venir ? Comment est-ce que l’on fait ?
Dès lors que l’on est décideur de la fonction RH, donc pas consultant. On ne se fait pas d’amis parce que malheureusement on respecte notre promesse, donc on les tient à l’écart. Et même lorsqu’un DRH passe de l’autre côté de la barrière, des fois, on a des difficultés. Mais dès lors qu’on est décideur de la fonction RH, il y a cotisation à partir de 490 € par an, qui peut être transmissible, c’est-à-dire que si il y a un sujet qui intéresse plus un homologue, on peut l’inviter et il peut prendre notre place.
J’avais eu le plaisir d’intervenir aussi, en tant qu’orateur sur une thématique et ça permet d’avoir cette belle dynamique sur ce lieu unique où tout le monde se retrouve pour travailler sur un sujet. Quels sont les sujets que tu pressens maintenant ?
Au Club, on a l’ambition en juin d’organiser un colloque sur tout ce qui est recrutement et marque employeur, qui est une vraie problématique dans nos organisations employeur aujourd’hui, on le voit. On a jamais vu autant de pancartes dans les restaurants « Cherche serveur »… donc c’est un beau sujet ! Et un sujet qui est en filigrane de ce sujet marque employeur, c’est celui de la captologie : la fabrique de l’attention. Est-ce qu’on peut s’inspirer des personnes qui font des séries pour capter l’attention des gens ? Les gamers, les éditeurs de jeux vidéo ont certaines techniques, et peut être qu’on peut s’en inspirer en RH pour arriver à capter l’attention, sans bien sûr être fake, puisqu’il ne s’agit pas de mentir, plutôt d’être en vérité, mais d’être remarqué et remarquable !
Est-ce que finalement ça s’adresse uniquement aux DRH ? ou ça s’intéresse aussi aux problématiques des responsables ou directeurs formation ?
Les directeurs formation sont les bienvenus. On considère au Club qu’un des moyens d’éducation des collaborateurs au sens noble du terme, ça passe par la formation. Il faut que le maximum de parties prenantes soient formés, engagés et « dans le move » pour qu’on réussisse à changer les choses.
Par exemple, le recrutement intéresse peut-être moins, hormis les cursus d’intégration, les responsables formation. Mais ils ont d’autres choses à apporter…
Par contre, de former au recrutement, pas forcément les recruteurs mais aussi les managers, former les collaborateurs à la sensibilisation de la responsabilité de chacun dans la marque employeur ou le recrutement, c’est un vrai projet d’entreprise dans lequel je pense le directeur formation peut avoir une place importante.
Complètement. Et donc à la fois comme acteur de la marque employeur, comme moyen de créer un ascenseur social, mais aussi de faire de la formation une marque (learnal branding) pour construire ou reconstruire la confiance autour de la formation et qu’elle puisse les aider à grandir.
Tout à fait ! Et puis il y a un vrai changement de paradigme, on le voit. C’est-à-dire que maintenant, chaque individu est porteur de sa raison de travailler. On parle beaucoup de raison d’être des organisations employeur. Aujourd’hui, il y a vraiment une raison exprimée de travailler ou pas de la part des collaborateurs. Les organisations employeur ont vraiment intérêt à regarder et observer auprès des individus quelles sont leurs raisons de venir travailler. Et là pour le coup, travailler ou former. Et je pense que dans le management à distance, il va falloir favoriser un nouveau « produit », entre l’événementiel et la formation, pour créer des rites, pour qu’on retrouve à nouveau des moments de convivialité, de plaisir, d’échanges, de travail, qui sont pas ceux qu’on peut avoir toute seul à la maison. Par contre, si quelqu’un dans l’organisation anime notre communauté avec des choses intéressantes, je vais y participer, ça va faire du collaboratif et ça va donner de l’intelligence au travail de chacun. Du coup, les gens vont se sentir bien dans l’organisation.
C’est aussi vraiment qu’on se retrouve dans les Ressources Humaines. Avec les confinements, les gens se sont interrogés sur leur travail, sur leur localisation. On a vu beaucoup de personnes monter leurs propres entreprises, des petites structures en auto-entrepreneur pour réfléchir à ce qu’ils veulent faire. Beaucoup de personnes ont quitté leurs jobs parce qu’ils ne s’y retrouvaient plus dedans. Donc il y a des vraies prises de conscience et que peuvent faire les entreprises face à ça ?
Justement, c’est de vraiment porter attention aux individus. Et puis après, en tant que marketer de la formation (je vais faire un peu de pub), c’est de mener des enquêtes pour connaître les attentes des collaborateurs. C’est un préambule qui est hyper intéressant. Il faut que ça soit bien fait. Souvent, on a le reproche d’avoir pris un questionnaire sur Internet, puis de faire un copier/coller. Non ! c’est presque un travail sociologique, donc nous, chez Adesidées, on travaille avec des sociologues pour justement créer des questionnements qui soient légitimes au sein d’une organisation, et qui ne vont pas être les mêmes que dans une autre. Et puis, on va le tester avec des groupes de travail pour vraiment être surs d’être pertinents. Du coup, après dans la passation du questionnement, les gens vont se sentir engagés, on va leur avoir donner le sens de ce questionnement, et du coup l’analyse devrait normalement porter ses fruits et en tout cas apporter des éclairages sur ce qu’attendent les collaborateurs en matière de training, d’ « ambiancement » du travail.
Donc ça, c’est la première partie, c’est la connaissance, les outils d’analyse pour éviter de travailler en aveugle. Et puis après, il y a le deuxième élément, quand on les connaît, c’est de leur proposer quelque chose, soit qu’ils attendent, ce qui est le plus facile et plus rare. Soit c’est de leur proposer quelque chose qu’ils n’attendent pas, et dans ces cas-là, ça leur permet de se dire « l’histoire me plaît bien, je suis prêt à m’engager ou il se passe quelque chose ». Est-ce que c’est quelque chose que tu trouves légitime ?
Complètement ! C’est de la captologie que de prendre par surprise les collaborateurs et de leur proposer quelque chose d’innovant, auquel il s’attendait pas. On est très dans « l’expérienciel », et c’est en ça où je pense que la formation, l’événementiel et la communication vont se rapprocher pour créer ces moments qui vont à leur tour créer de la positivité au travail.
J’aime beaucoup l’idée quand tu parles de sociologie, parce que c’est vrai que de plus en plus, les formations deviennent événementielles, c’est-à-dire qu’il se passe un truc quand on fait un présentiel. Mais à côté de ça il y a toutes les communautés apprenantes, qui consistent à faire lien entre tout le monde entre ces moments d’événement. Ca permet justement de les créer et c’est une nouvelle façon de faire de la pédagogie de capter l’attention.
Oui. Et puis trouver des intervenants, soit en interne, soit en externe apporte un plus. Quand on fait intervenir des gens célèbres ou des sportifs, le message va être porté, quitte à ce qu’après il soit travailler avec des personnalités un peu moins célèbres. Mais en tout cas avoir des marqueurs et des gens qui impactent dans le message, par leur charisme, leur expérience ou leur histoire, en général c’est « bankable ».
Qu’est ce que tu conseillerais à un DRH ou à un responsable de formation qui se dit : « j’aimerais bien susciter l’effet waouh » ?
C’est de se creuser la tête pour savoir qu’est ce qui pourrait fonctionner pour créer « l’effet waouh » ! On a eu la mode du gaming… je pense c’est en ça que les directions des ressources humaines et les directions formation doivent s’ouvrir au monde, à toutes ces nouveautés parce qu’il y a des choses très intéressantes dans le gaming, dans l’intelligence artificielle… On peut faire des choses atypiques mais qui donnent du sens. C’était un moment la mode des team buildings où on faisait la fête mais d’où il ne ressortait pas grand-chose. Aujourd’hui, il faut faire des team buildings de la formation mais qui ont du sens, et où les gens vont pouvoir produire pour avoir des livrables qui vont pouvoir servir à la communauté.
Ce qui est assez extraordinaire je trouve dans la formation, c’est qu’on s’aperçoit que l’émotion collective, quand on la construit, permet d’apprendre mieux, plus longtemps et d’assurer les transformations avec des passages à l’acte. Les gens se disent « ça serait bien qu’on le fasse » mais entre cette étape et « on le fait pour de vrai », il y a des moments de cristallisation qui doivent se travailler.
Et le fait d’animer ses communautés, c’est quelque chose qui est très intéressant. La formation pourrait animer une communauté, avoir des ambassadeurs qui seront aussi des bons recueils de remontée d’informations, pour faire vivre la stratégie formation en conséquence.
Quel est ton point de vue sur les Chief Happiness Officer ?
Je suis assez mesuré sur le fait d’essayer de trouver son bonheur au travail. Par contre, il n’y a pas de mal à se faire du bien, à avoir des choses un peu sympas donc d’animer positivement par des actions événementielles, ou autres, pourquoi pas !
C’est plus une notion américaine, anglo-saxonne alors que nous, on est plus sur une notion de bien-être. Par contre, ils ont souvent des budgets événementiels qu’on peut cumuler avec du recrutement, avec de la formation ou d’autres événements. Mais l’important c’est d’arriver à l’intégrer dans la culture d’entreprise.
Oui, et puis de donner du sens à tout ça. Tout est lié, on le voit. Une grande problématique dans les entreprises, c’est les silos. Et le fait que les différents services RH ne communiquent même pas entre eux. C’est dommageable, car créer du lien, et de la transversalité, c’est ce qui va aussi participer au succès des actions collectives.
Et tout ça se prépare et se travaille !
Oui, et puis d’embarquer les parties prenantes ! et aujourd’hui, les organisations vont avoir un chantier de renouvellement des représentants syndicaux, et le dialogue social, c’est super important. Chez décidRH, on est très adeptes du management durable, et de lier performance économique et sociale. L’un ne va pas sans l’autre et donc, d’avoir des interlocuteurs qui soient bien formés, bien informés de la stratégie, des concurrents, c’est un gage de réussite des actions qui sont mises en place.
Tu sens dans ces corps intermédiaires une envie de partir à l’aventure, pour reprendre un terme à la mode ?
Je l’espère ! En tout cas il faut qu’on quitte le dogmatisme d’opposition. Partenaires sociaux, il y a le mot partenaire qui est un mot sympa et qui prend tout son sens quand on travail sur des sujets importants et la qualité de vie au travail en est un.
Souvent est ce que tu ne dirais pas que c’est un problème de méconnaissance ? Ils ont des habitudes et des postures, et quand on leur dit que l’IA peut changer des choses, ils se disent « je ne sais pas ce qu’est l’IA, je ne sais pas ce qu’est un algorithme, je ne sais pas ce que on peut en faire, je ne sais pas en quoi j’en fais un avantage pour les salariés, et comme je ne sais pas je reste sur ce que je connais ».
Aussi ! Du coup, le directeur formation peut jouer un rôle, notamment dans l’acculturation à ce qui va nous arriver demain. Dans l’industrie, on sait que les OS qui étaient très qualifiées et performantes à la robotisation, quand les nouvelles machines avec l’IA vont arriver, il y a une limite qui va être compliquée. Donc il faut bien s’y prendre en amont : soit on est en capacité de faire monter en compétences les gens, soit il faut prévoir des éventuelles reconversions et anticiper.
Et c’est aussi ce qu’on retrouve avec des publics nouveaux, comme les générations Z, ces jeunes qui rentrent, qui fonctionnent différemment, qui sont des adeptes de Tik Tok, des gens qui fonctionnent avec des rythmes très différents et finalement, ce sont eux qui vont réinventer une partie de l’entreprise.
Oui et puis qui vont booster un peu les anciens dont on va commencer à faire partie ! Mais la notion de tutorat est intéressante aussi. Du coup les jeunes apprennent des anciens et les anciens apprennent des jeunes et il y a une émulation. Et ça peut être un vecteur sur lequel on peut jouer sur certains sujets.
C’est là où les émotions et les événements permettent de créer du lien parce que ça permet justement de revenir à l’humain. Et que finalement un jeune ou une personne qui a été jeunes sont des personnes qui fonctionnent avec une même dynamique mais pas de la même façon. Ca met en valeur « le commun », et c’est ça la valeur de l’entreprise.
Il faut être bien conscients que nos jeunes, ils apprennent plus comme avant et que, eux pour aller chercher des tutos sur Internet, ça leur pose pas de soucis et que du coup, quand on organise des formations, il faut que ça soit sur d’autres vecteurs que l’apprentissage classique d’un sachant qui transmet son savoir.
Ils sont très demandeurs de plein de choses, notamment de produire du contenu et pour la société est un plus mais c’est au formateur de l’intégrer pour qu’au final on atteigne les objectifs. Mais cela veut dire que si l’on part d’eux, on réinvente complètement la manière de faire de la formation.
C’est en ça que l’animation par les directeurs de formation de communautés peut vraiment être salvatrice parce qu’on va solliciter des gens qui sont volontaires et qui vont donner du temps, de l’énergie, du savoir pour être « in ».
Justement, les communautés, qu’elles soient apprenantes ou d’information, comment tu conseillerais quelqu’un dans les ressources humaines qui souhaiterait travailler sur une thématique, monter une thématique et que cela marche ?
Ce que l’on vient d’évoquer, c’est-à-dire qu’il y a un minimum de connaissances à avoir sur un sujet. Là récemment on avait animé des communautés sur les aidants. C’est une problématique qui se pose face au vieillissement de la population. Le premier niveau, c’est l’acculturation au sujet, donc de savoir de quoi on parle, de mettre des mots, de connaître les structures et les problématiques. Souvent il y a des retours d’expérience qui sont menés et la communauté va pouvoir ensuite choisir ses outils de communication pour que les gens s’approprient un sujet pas forcément très sexy.
Tu dirais que ça prend beaucoup de temps d’être animateur de communautés ?
Il faut toujours avoir un coup d’avance, l’animateur de la communauté doit avoir défini son plan bien à l’avance. Et qu’il utilise des outils variés, la radio de Stéphane Diebold peut en être un, cela peut être de l’affichage à un moment donné, un gros événement… bref de varier un peu les rythmes.
Bref d’avoir une vraie histoire à raconter, avec une vraie pédagogie. Il y a des moments forts, des événements, une routine qui se crée et une fois que tout ça est écrit, ce qui est le plus difficile, après c’est le suivi qui est important et comment on le fait évoluer.
Oui et d’arriver à capter le public, pour qu’il soit au rendez-vous quand on le sollicite.
Et là on le voit, parce qu’il y a beaucoup de personnes qui n’ont pas ce travail d’écriture, ce qui fait toute la différence. Et comme ils n’ont pas ce travail là, ils mettent des choses au milieu, les autres se disant c’est intéressant mais je ne « like » pas, regardant ça de loin sans s’engager et comme il ne se passe rien, s’en vont. Et si on a justement cet engagement, que les personnes donnent leur avis etc. ça permet d’aller les solliciter et de pouvoir petit à petit les faire rentrer dans mon histoire, même si au début on tire peu pour qu’ils viennent, au final ça crée un espace où les gens ne sont plus tout seul. Et dans beaucoup d’espaces de management, de vendeurs, de formateurs qui sont seuls face à une salle, ce sont des métiers très impactants car ils sont les ambassadeurs de la qualité de l’entreprise sauf que de l’autre côté ils n’ont pas cette super vision qu’ils pourraient partager de pair à pair.
Si tu avais des tendances à donner dans les ressources humaines ? Qu’est ce qui se dégage de manière générale ? Le numérique peut être ?
On vit dans un monde en changement permanent. Là il y a un vrai besoin, on a parlé de rythmes, mais dans les rythmes, il y a aussi les moments de respiration. On le voir, le fait de courir en permanence, tout le temps, après le changement qui ne s’arrête pas, on va s’épuiser. Donc il va falloir aussi que l’on invente des moments de ressourcement et là on pas tous forcément les mêmes besoins. Et donc que l’entreprise soit à même de proposer aux salariés de faire un petit break, […] ce qui peut être profitable pour l’organisation.
C’est tout ce que sont les soft skills, quand on dit gestion du stress, intelligence émotionnelle etc. Aujourd’hui les entreprises ne sont pas à l’aise avec ces « outils » là. Hormis de dire, on va faire une formation de 2 jours pour apprendre à gérer le stress, ce qui peut ne pas être efficace et derrière il manque quelque chose à construire. Ou on construit en faisant, ce qui est important car ce qui porte la culture, c’est d’abord les ressources humaines.
Tout à fait. On va vraiment aller vers l’individu. L’individu va aussi gagner en authenticité. Je pense qu’avant on était assez « docile », on faisait le job, on était bien dans le job. Aujourd’hui, les nouvelles générations, soit ça matche, soit ça matche pas mais on se forme beaucoup moins qu’avant. Pour que ça matche, il va falloir que les organisations employeur soient un petit peu plus souples, et puis qu’elles osent développer des moyens d’embarquer les collaborateurs dans l’envie et dans l’enthousiasme qu’il peut y avoir à travailler. Parce que les sociologues ont prouvé que le travail, c’est la santé !
Exactement. L’homme est un animal social. On a besoin de ça, on a besoin des autres sauf qu’effectivement il faut que ça ait un peu de sens. Quand on est en responsabilité, on a besoin de se construire de la veille, c’est quoi les prochains sujets abordés dans décidRH ?
On a parlé du côté marque employeur et captologie. Et après il y a presque ce côté qu’on appelait avant le coaching sur l’authenticité, oser être soi. Oser être soi avec quand même des règles quand nous sommes au travail, des règles de fonctionnement.
Dans beaucoup de boites on dit « oser être soi, c’est pas le boulot de l’entreprise ».
Et pourtant, on va plus garder ses collaborateurs, ce qui est une vraie problématique aujourd’hui, et les engager s’ils sont biens ! En marketing, on dit souvent : il faut mettre la bonne personne au bon poste au bon moment avec les bonnes compétences et les bons managers. C’est une équation qui est assez complexe mais vers laquelle il faut tendre parce que sinon, ils vont tous s’en aller.
Alors ça ne parait pas une réalité, parce que pendant le confinement il y a eu une sidération donc tout était gelé, mais on se trouve dans une situation de tension, et ceux qui s’en vont, généralement, c’est les bons.
Bien sûr ! Les premiers qui partent sont les bons.
Et donc là, on rentre dans la fidélisation et donc, dans une démarche marketing à la fois dans l’étude de ce que veulent les gens et ce qu’on peut leur proposer, et comment est-ce qu’on peut co-produire, faire des choses ensemble.
Et là pareil, le responsable formation a toute sa place. Parce que vouloir grandir, faire évoluer ses compétences… c’est des choses qui sont vraiment demander par les collaborateurs aujourd’hui. La partie rémunération est une chose, la partie confort, vie perso et qualité de vie au travail et après la partie évolution. Comment je me projette dans la société ? dans mon job de demain ? C’est passionnant !
Faire rêver les gens, ça parait comme donner du sens. Mais quand on les fait rêver, on leur donne envie. Il y certes des épreuves mais on peut les faire ensemble, les gens sont preneurs de ça. C’est pour ça qu’ils aiment bien les start-ups, parce qu’ils voient qu’il y a un enjeu, qu’il y a quelqu’un qui mouille la chemise, qui y va… on se dit qu’il y a de la vie là ! C’est plus intéressant que de remplir ses petits dossiers dans son coin, alors que les deux sont possibles !
Avoir conscience de l’impact qu’on a sur la réalisation de la mission, c’est beaucoup plus facile quand on est dans une start-up que lorsqu’on est dans une multinationale. Mais de travailler sur l’impact que donne chacun, dans la réalisation des missions de l’entreprise est central.
Très beau projet ! Si on trouve tout cela intéressant, comme fait-on pour te rejoindre ?
Pour le club RH, c’est : https://decidrh.com/
Et pour retrouver des programmes de formation, c’est : https://adesideesdeformations.com/
La prochaine session décidRH, c’est quand ?
Alors on a des petits cafés idées régulièrement. On en a fait un hier justement sur l’authenticité avec Dominique Bellos. On en a un prochain sur qu’est-ce que la sociologie peut apporter aux ressources humaines ?
C’est un expert qui vient, et un petit groupe discute avec lui ?
Voila, c’est ½ heure où les experts apportent de la valeur ajoutée auprès de nos décideurs RH. Et puis au mois de mars, c’est comment manager autrement, avec un ingénieur cogniticien qui lui promeut le fait que l’on apprenne tous comment fonctionne le cerveau pour devenir un meilleur communicant et donc pour les managers à ne pas être blessant et mieux communiquer avec ses collaborateurs.
Donc déjà un café, puis un grand événement marque employeur !
Oui ! Le colloque marque employeur sera parisien. Et on retournera à Lyon et Marseille au second semestre en espérant que la crise sanitaire sera derrière nous et qu’on puisse enfin se rassembler. J’ai entendu un sociologue très intéressant dire que l’on était le pays du bisou. A cause de la crise sanitaire, on a perdu cette chose qui était unique dans le monde, de se faire la bise quand on se disait bonjour ou au revoir.
On ne pouvait pas terminer mieux. Merci Christophe !
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