Le Club DéciDRH fier d’être Marseillais !
Une vue incroyable sur le Vieux Port, le cri des mouettes, le mistral, rien ne manquait à la carte postale (à part le soleil !). C’est en effet à Marseille que s’est déroulée le 5 mars la soirée Culture, Foot et RH organisée par le Club DéciDRH, pour honorer la cité phocéenne, capitale européenne de la culture 2013, et l’OM, son équipe de football emblématique. Nous avons noté à cette occasion que les deux clubs (OM et DéciDRH) possédaient les mêmes couleurs…
Après avoir remercié la cinquantaine de participants présents, Christophe Leparq présente Thierry Mosbah « que tous les Marseillais connaissent !», qui a beaucoup œuvré à la préparation de la soirée dont il est l’animateur. DRH de SERIS SECURITY, Thierry représente un bel exemple de mobilité puisqu’il vit à Marseille et travaille à Saint-Nazaire.
Un petit tour de table nous permet ensuite de mieux connaître les intervenants :
Frédérique Alverola, arrivée à l’OM en 1998 pendant la coupe du monde de football en tant que stagiaire, est rapidement devenue Directrice des Ressources Humaines. Frédérique connait bien ses collaborateurs puisqu’elle a recruté environ 75% de l’effectif actuel, qui comprend 150 collaborateurs, dont 30 pour l’équipe des joueurs.
Cédric Dufoix, secrétaire général de l’OM, a intégré le club au tout début des années 2000. Il avait auparavant travaillé chez Adidas, et à l’organisation d’événements sportifs mondiaux comme les jeux olympiques d’Albertville et la coupe du monde de football de 1998.
Jane Salmon, Associée chez Barthélémy Avocats, dirige le cabinet de Marseille. Partenaire du Club DéciDRH depuis ses débuts, Barthélémy Avocats est spécialisé en droit social.
Gautier Kertudo, Avocat, est membre de la commission droit du sport chez Barthélémy Avocats. Il a couplé ses deux passions, le sport et le droit, dans un seul métier. Il s’occupe des contentieux et conseille les clubs et fédérations sportives sur les problématiques liées au droit du travail dans le milieu sportif.
Bertrand Collette fait partie de l’équipe dirigeante de Marseille Provence 2013, où il est chargé de la gestion des grands chantiers et de la coordination territoriale.
Jean-Pierre Blay, historien du sport, est maître de conférences à l’université de Paris X-Nanterre. Membre du laboratoire « Sport et culture », son domaine de recherche porte sur l’émergence des pratiques physiques et la culture matérielle liée au sport.
Il nous résume la naissance de la ‘sportivisation’ en France qu’il définit en trois étapes « un règlement écrit, un lieu adéquat, et la fabrication des accessoires et des tenues ». Les premiers clubs sportifs à se créer sur le territoire français furent les clubs hippiques, sous l’impulsion de Louis-Philippe en 1833, qui s’inspira du modèle des courses de chevaux en vigueur depuis longtemps en Angleterre. La France se couvre alors d’hippodromes et en compte 380 avant la guerre de 1914. Les premières rencontres de football se déroulent sur les hippodromes, et les joueurs portent des tenues de jockey, seules tenues de sport fabriquées à l’époque (le plus souvent par Hermès).
La gestion de l’éphémère
Thierry Mosbah interpelle les intervenants sur une particularité commune aux domaines de la culture et du sport : la gestion de l’éphémère, et son impact sur le modèle de gouvernance.
Cédric Dufoix précise : « Chaque club a son propre modèle. L’équipe de Lyon par exemple est portée par la vision d’un seul homme, à la fois propriétaire et président. A Marseille nous nous appuyons sur une équipe extrêmement stable de cadres dirigeants, experts dans leur métier. L’actionnaire est stable, les présidents restent de 3 à 5 ans et l’équipe de joueurs change sur une durée de 2 ou 3 ans… »
Bertrand Collette nous raconte l’aventure de Marseille Provence 2013. Pendant les deux ans de la phase de candidature, l’équipe compte une dizaine de personnes. Une fois le titre décroché, une autre gouvernance se met en place, prenant en compte le territoire et ses particularités. Une structure indépendante loi 1901 est créée. Puis la ville de Marseille s’associe avec la région et la ville d’Aix. « Pour sortir du champ politique, nous avons fait appel à des personnalités comme l’ancien président de La Villette qui a porté le projet pendant la candidature et deux ans après, remplacé ensuite par un nouveau président. Ce départ a fait du bruit dans la presse, mais l’équipe projet demeure stable depuis le début, et a tenu bon sur les lignes directrices et les lignes artistiques malgré la pression extérieure. »
L’effectif Marseille Provence compte 130 collaborateurs actuellement, et a édité 650 feuilles de paye en janvier. « La montée en puissance des équipes est compliquée à gérer » commente Bertrand Collette, « d’autant plus que le projet doit se monter en parallèle, en partant de zéro. De plus nous travaillons sur une opération dont la date de fin est connue, ce qui pose des questions en termes de gestion des RH : quel modèle de contrat, CDD ou CDI ? Comment accompagner au mieux la fin d’exploitation de la structure ? »
Être fan de l’OM, mais pas trop…
A Thierry Mosbah qui lui demande comment se passe le recrutement à l’OM, Frédérique Alverola répond : « L’OM comptait moins de quarante personnes à mon arrivée. Le modèle était encore très amateur. La coupe du monde de football de 1998 nous a fait bondir en avant, on est passé du ‘bar des sports’ à une entreprise organisatrice d’événements. Le renouvellement des présidents tous les 3 ou 5 ans donne aussi un coup de fouet à la gouvernance. »
Quel profil pour être recruté à l’OM ? « Nos futurs collaborateurs doivent aimer et connaître le football et Marseille, mais ne pas être des fans absolus. Car les défaites (et les victoires !) pourraient entraîner des réactions passionnelles susceptibles de nuire au bon fonctionnement de l’entreprise. De plus les joueurs sont nos collègues, nous devons conserver une attitude normale avec eux. Cette précaution nous permet de maintenir une solidarité et une stabilité dans le climat social de l’entreprise indispensables en période de mauvais résultats sportifs. »
Pour Bertrand Collette, le secteur de la culture s’est également beaucoup professionnalisé ces dernières années. « Le recrutement est rendu encore plus complexe de par la spécificité de notre opération. On a cherché à embaucher des personnes reconnues au niveau national dans leur domaine, mais qui se sont retrouvées à la limite de leur compétence en raison de la pression extérieure. »
La confidentialité, à préserver dans des milieux très exposés !
Selon Cédric Dufoix, le vrai problème réside dans la protection de la confidentialité : « Nous vivons avec les journalistes. Nous avons réussi à préserver la confidentialité jusqu’à présent, mais cela devient difficile avec Twitter ».
L’OM s’est rendu compte d’une fuite d’informations provenant du compte Twitter d’un collaborateur. Suite à cet incident le club a mis en place une charte des réseaux sociaux pour indiquer les bons usages et rappeler la culture de la bulle prônée par l’OM autour du club sportif.
La problématique de contrôler l’activité des salariés sur internet et les réseaux sociaux devient de plus en plus prégnante au sein des entreprises. Certaines choisissent de limiter les outils technologiques. Pour Jane Salmon, « la meilleure méthode reste l’éducation du collaborateur. Il faut trouver l’équilibre entre préservation de la vie privée du collaborateur et protection des intérêts de l’entreprise. » Elle nous cite l’exemple de deux salariés de la même entreprise ayant créé un groupe sur Facebook, dénigrant fortement le DRH. Les deux ont été licenciés, dont un sur faute grave car il avait ouvert sa page Facebook à tout le monde (on tombe dans le domaine public ce qui a entraîné un motif de diffamation), alors que l’autre avait sécurisé son accès (on reste dans la sphère privée). Ainsi deux utilisations du même outil technologique ont mené à deux sanctions différentes.
Gautier Kertudo nous rappelle que l’arrêt Bosman a révolutionné le monde du sport professionnel, dont le foot : c’est à partir de ce moment-là que le footballeur a été considéré comme un salarié à qui on appliquait un CDD et des textes. Depuis, chaque fédération sportive a rédigé sa propre convention collective comprenant des règles spécifiques. Plus un sport est médiatisé, plus les textes juridiques le concernant sont développés. Les problématiques liées au milieu du sport professionnel couvrent un large panel car elles concernent aussi bien le personnel administratif que les sportifs au profil très atypique.
La diversité des métiers
L’OM se décomposent en 3 entités : la SASP qui gère l’activité événementielle et l’équipe professionnelles, une chaine de télévision avec un site internet, et l’Association Olympique de Marseille. Les RH gèrent ainsi des métiers et statuts aussi divers que commerciaux, journalistes, intermittents du spectacle, techniciens, joueurs, formateurs, bénévoles… « Nous comptons quatre conventions collectives différentes pour 150 collaborateurs », précise Frédérique Alverola.
Marseille Provence 2013 regroupe environ 20 métiers pour 140 salariés, avec des particularités comme les contrats d’artistes. Une seule convention collective est appliquée mais elle est « surréaliste» selon Bertrand collette. « Les négociations avec les DP sont compliquées et il n’est pas toujours aisé de faire accepter de façon informelle les choses. Quel contrat appliquer à nos salariés ? CDI ou CDD ? La solution économique n’est pas évidente à trouver. »
La culture RH à l’OM
Pour Jean-Pierre Blay, « la devise de l’OM, ‘droit au but’ a créé son ADN. L’OM est une équipe qui a compté de nombreux attaquants historiques ! Le club cristallise la satisfaction d’une France qui se bat, c’est pourquoi l’équipe a des fans partout en France, y compris à Paris.»
« Oui, l’OM est un club populaire, qui tient par ses valeurs. Le capital sympathie du club résiste très bien dans les études nationales d’opinion publique » ajoute Cédric Dufoix.
La gestion des RH est bien entendue liée aux résultats sportifs. Si l’équipe ne se qualifie pas pour la Champions league, la perte financière est très importante. De même si le classement en ligue 1 ne correspond pas aux objectifs fixés. Pour le championnat en France, le budget est défini en se basant sur la cinquième place. « Nous perdons 1 million d’euros par place perdue dans le championnat » indique Frédérique Alverola. « La masse salariale représente 60% du CA. En cas de non atteinte des objectifs, nous devons procéder à des coupes budgétaires. »
Question de la salle : Pourquoi le projet Marseille Provence 2013 n’est-il pas pérennisé ? Comment motiver les salariés pendant un an afin qu’ils restent performants sur la durée ?
Pour Bertrand Collette, le projet Marseille Provence 2013 est « une opération commando. Ce genre de manifestation fait gagner plusieurs années de constructions et de notoriété à une région. Certains lieux vont rester et certaines initiatives artistiques seront peut-être reconduites. Mais les financements privés (17 millions) ne se renouvelleront pas tous les ans ! » Concernant la motivation des salariés, « Il est vrai qu’un an c’est long, surtout vécu avec une telle intensité. Mais les personnes connaissent la règle du jeu dès le départ, et ne sont pas forcément demandeurs de prolonger le contrat dans ces conditions de pression externes très fortes. Nous travaillons sur un PSE, afin d’accompagner nos salariés à la fin du projet. Travailler sur cette opération donne une excellente carte de visite, et nous espérons que la région va en embaucher une grande partie. »
Un grand merci à tous !