C’est sous le soleil marseillais, avec une vue magnifique sur le vieux port, que s’est déroulée la sixième édition de l’Université du Club DéciDRH, placée sous le thème de la culture RH, en résonnance avec la nomination de Marseille en tant que capitale européenne de la culture 2013.
Christophe Leparq, Fondateur du Club DéciDRH
Jacques Rocca Serra, Adjoint au Maire de la VILLE DE MARSEILLE
Christophe Leparq, fondateur du Club DéciDRH, accueille les participants par ces mots : « Notre club aime créer la rencontre entre décideurs RH de cultures différentes : grands groupes et PME du secteur privé, organisations de la fonction publique. Nous aimons aussi construire des liens entre des univers variés et les RH, et nous nourrir de la culture de chacun. La diversité est une grande richesse ! Nous pratiquons la mixité des cultures au sein du Club : la culture mérienne avec notre président l’Amiral Lajous, la culture terrienne de par mes origines percheronnes et même la culture spatiale avec notre colloque La Mer, l’Homme et l’Espace ! ». Christophe Leparq remercie ensuite les partenaires du club « Barthélémy Avocats nous apporte leur culture juridique, blueKiwi leur culture digitale et AdesIDEESrh leur culture en marketing RH et communication sociale. »
Histoire Marseillaise
Jacques Rocca Serra, Adjoint au Maire, est l’un des plus anciens élus de la Ville de Marseille : 37 ans sans discontinuer « Je ne vous dirai pas comment j’y suis arrivé… » nous précise-t-il. Il se déclare ravi d’accueillir l’université des Décideurs RH, milieu qu’il connait bien. Ancien dirigeant de la RTM pendant 15 ans, il se souvient notamment d’une grève de 46 jours.
« Je ne vais pas vous infliger le discours convenu que l’on m’a remis ! » s’exclame-t-il en préambule. « Parler de Marseille est à la fois simple et compliqué. Sa réputation est sulfureuse, mais cette ville extrêmement attachante et forte a su renaître plusieurs fois de ses cendres, en particulier depuis 1995, date à laquelle le gouvernement a décidé d’aider Marseille en lançant la grande opération Euro-méditerranée. »
Quelques faits significatifs et méconnus : Marseille compte 2 600 ans d’histoire ! Deuxième ville de France devant Lyon, deuxième pôle scientifique, première université avec 70 000 étudiants, premier port français et troisième port mondial concernant les hydrocarbures, Marseille fait le trait d’union entre les peuples de la méditerranée et de l’Europe. Elue capitale européenne de la culture en 2013 « au grand étonnement de tous ! » s’amuse Jacques Rocca Serra, la ville continue de tracer sa courbe dynamique : « nous avons investi 650 millions d’euros dans les structures culturelles, notamment le MUCEM. Le Port est en complète rénovation. Le chômage a diminué de 21,6% à 12,6% aujourd’hui, une vraie gageure ! »
Le label Empl’itude
Marseille a créé le label Empl’itude « qui distingue les bonnes pratiques et les progrès des entreprises de la région de Marseille en faveur de l’emploi et de l’insertion professionnelle », précise l’Adjoint au Maire. « J’ai beaucoup d’estime pour les DRH. Votre rôle, au cœur de l’entreprise, consiste à tendre la courroie de transmission entre la direction et le personnel. Votre talent est mis à rude épreuve tout au long de l’année. Pour vous détendre, je vous invite à vous promener sur le vieux port et à admirer l’Ombrière de Norman Foster ! »
L’animatrice de la journée, Antonella Desneux, Vice-présidente de DéciDRH et Directrice de la Diversité et de la Citoyenneté du Groupe SFR passe ensuite la parole à Olivier Lajous.
Introduction et Mise en perspective du concept de Culture RH
Qu’est-ce qu’une culture RH ? «La culture ne s’hérite pas, elle se conquiert.» – André Malraux
Olivier Lajous, Président du Club DéciDRH, élu DRH de l’année 2012, Président de la SOCIETE NATIONALE DE SAUVETAGE EN MER
Nous vivons plusieurs vies en même temps : professionnelle, personnelle, amicale, familiale, dont les frontières sont de moins en moins étanches, mais que nous avons du mal à conjuguer dans une société qui a tendance à les découper en silos. Cela constitue un des maux chroniques de notre temps pour Olivier Lajous.
« Une entreprise et un diplôme ne peuvent pas fournir toutes les recettes » continue Olivier Lajous « chacun doit devenir le premier acteur de sa vie, afin de se réaliser. L’entreprise doit apporter la motivation en favorisant l’autonomie et la prise de décision ».
Comment sortir du rapport de métier souffrance ?
« Le DRH doit en permanence taper sur l’épaule du Directeur Général pour lui rappeler que les hommes et les femmes représentent la seule richesse de l’entreprise. Le tout-finance arrive à son terme. Le système du profit à tout prix va disparaitre. »
Pour aider l’humain à se mettre en mouvement, il faut redonner de la souplesse au temps. « Aujourd’hui le temps est contraint » insiste Olivier Lajous « cela crée du présentéisme. L’entreprise doit faire confiance, laisser la place à l’autonomie : certains aiment travailler tôt, ou au contraire tard, le dimanche, ou au domicile. La confiance représente la fondation sur laquelle un nouveau modèle de rapport au temps doit être construit. »
Cet état d’esclavage de l’homme face au temps crée de la violence et un stress phénoménal. Il faut réconcilier l’entreprise avec le temps.
L’humain doit développer sa capacité à imaginer un autre monde. « La culture nomade a beaucoup à nous apprendre. Les peuples nomades s’adaptent à des milieux différents, et conjuguent leurs besoins avec ces milieux. »
« Ne laissons pas la culture RH devenir une technocratie. Récupérons le H à la dérive, et replaçons-le au centre de l’entreprise ! » conclut le président du Club DéciDRH.
« Place maintenant au trio de choc de Barthélémy Avocats qui va nous dérouler un panorama des enjeux d’une culture RH », intervient Antonella Desneux.
Les enjeux sociaux et sociétaux liés au développement d’une culture RH en 2013
Paul-Henri Antonmattei, Associé, BARTHELEMY AVOCATS
Jane Salmon, Associée, BARTHELEMY AVOCATS
Franck Morel, Associé, BARTHELEMY AVOCATS
Jane Salmon prend la parole en premier « parce qu’après, connaissant mes confrères, j’aurai du mal à placer un mot ! » et indique qu’elle fête ses 10 ans de vie à Marseille « ville d’une diversité incroyable avec ses difficultés et ses richesses, possédant une culture forte, une histoire, un club de foot qui représente le ciment de cette ville. »
Le cabinet Barthélémy Avocats, fondé il y a 50 par Jacques Barthélémy à Clermont-Ferrand, compte aujourd’hui 16 cabinets en France. « La culture de notre cabinet s’est développée autour de la personnalité et des principes de son fondateur. Fait rare en France, tous les avocats, y compris les associés, sont salariés. Cette culture repose sur une pensée : Concorde et Excellence. Nous devons tous avoir conscience que la culture d’une organisation, doit être véhiculée, rappelée et défendue avec force pour la faire perdurer dans le temps. Place maintenant à deux dignes représentants de cette culture ! »
Le cap européen à suivre : la flexisécurité
Paul-Henri Antonmattei précise qu’il va nous parler d’objectifs et de cap plutôt que de droit qui « comme l’intendance, suivra ! »
Aujourd’hui les enjeux sociaux grimpent en intensité. L’entreprise ne vit pas seule. Elle n’intéresse pas seulement les parties qui concourent à sa richesse mais est devenue un lieu de synthèse d’intérêts internes et externes. On attend de l’entreprise beaucoup plus qu’avant, au détriment de la décision politique.
« Le rôle des DRH sur le plan démocratique devient encore plus prépondérant quand la confiance s’effrite ou en période de peur comme celle que nous vivons en ce moment » souligne l’avocat.
La société européenne suit actuellement le cap de la flexisécurité. L’accord national interprofessionnel de Janvier 2013 modifie les paradigmes dans la construction des relations de travail et conduit à un mariage entre social et sociétal. « L’élément le plus novateur concerne la sécurisation des parcours professionnels. Nous sommes capables d’appréhender le parcours d’un concitoyen dans sa vie et non plus seulement dans son activité salariée, ce qui va entrainer bien d’autres mesures politiques à venir. Les DRH auront beaucoup à œuvrer dans ce domaine ».
On compte plus de 15 000 ruptures conventionnelles par mois. « La sécurisation du parcours professionnel comprend de nombreux outils, mais quelle en est la traduction concrète dans l’entreprise ? » interroge Franck Morel. La mobilité, premier aspect de la construction du parcours professionnel, est traitée à travers un empilement de dispositifs très compliqués, qui nécessite de savoir utiliser les bons outils au bon moment.
Un contrat d’intérim en CDI est en cours de discussion : il permettrait d’allier la souplesse des besoins de l’entreprise avec la sécurisation du salarié.
« La formation professionnelle nous laisse sur notre faim » ajoute Franck Morel. « Les demandeurs d’emploi n’en bénéficient pas assez. On annonce la création d’un compte personnel de formation, qui apparait comme un parent pauvre de la dernière réforme. On n’a pas fini de parler de ce sujet. »
L’allongement du temps de la vie et donc du temps d’activité professionnelle représente un défi extraordinaire à relever, et pas seulement en termes financiers, selon Paul-Henri Antonmattei. Le contrat de génération ne va pas suffire à répondre à l’enjeu intergénérationnel. « L’entreprise a longtemps vécu dans la culture des départs anticipés et des pré-retraites. Maintenant tout le monde doit rester ! La réponse à cet enjeu passe donc par un changement culturel, qui va prendre du temps. Les DRH vont devoir s’investir dans cette mission et porter très haut le discours de l’intergénérationnel, sous l’angle non pas de l’opposition mais de la complémentarité. »
« Le taux d’emploi des séniors a augmenté de 10 points en 10 ans environ et à démographie constante» précise Franck Morel. « La France se situe au-dessus de la moyenne européenne pour les emplois séniors de moins de 60 ans, mais à la traine pour ceux de plus de 60 ans. »
Santé et sécurité au travail
Ce sujet comporte un versant positif : le fait de considérer que le travail doit permettre de s’épanouir, mais aussi un versant plus obscur car le droit n’est pas rassurant pour le chef d’entreprise. En effet le droit impose une obligation de résultat, alors qu’il est difficile de mettre en place des conditions de sécurité et santé dans les domaines organisationnels ou psycho sociaux.
Le dialogue social
« Cet enjeu transcende les autres » fait remarquer Paul-Henri Antonmattei. « Il comprend les notions de confiance dans l’autre, respect, liberté, possibilité d’agir ensemble, innovation et acceptation de l’innovation. Notre pays offre plus de liberté aux partenaires sociaux, ce qui est le bon chemin à suivre. Les difficultés vécues en ce moment représentent l’occasion d’oser et de retrouver par le dialogue la trilogie liberté, égalité, fraternité. Cet enjeu doit être partagé par les RH avec la négociation collective. »
Un projet de loi sur la constitutionnalisation du dialogue social a été déposé. Est-ce la solution pour donner plus de portée encore à la négociation collective ?
De plus en plus d’accords d’entreprise sont signés. « Il faut continuer ce mouvement qui permet de prendre en compte la situation de chaque entreprise » souligne Franck Morel. « Pour avancer, nous devons également traiter les questions de la relation de l’accord collectif avec le contrat de travail et des acteurs en présence, car la représentativité patronale n’est pas évoquée dans la constitutionnalisation. C’est encore un chantier en devenir ! »
Le DRH est-il le « G.O. » de la culture de son organisation ?
Le DRH doit être politique avant tout (et surtout pas technique !)
Izy Béhar, Rédacteur en chef de la REVUE PERSONNEL de l’ANDRH, récemment élu Président de l’EAPM (European Association for People Management).
Thierry Mosbah, Directeur des Ressources Humaines, SERIS GROUP
Antonella Desneux nous donne la définition du G.O. du Club Med : ambassadeur de l’esprit du Club Med, créateur de liens, diffuseur de bonheurs, il doit faire preuve de gentillesse, d’ouverture, de générosité, de joie de vivre. Il doit être présent et disponible 24h sur 24.
Izy Béhar connait bien cette définition puisqu’il a été G.O. au Club Med. « Tout ce que vous avez vu dans les Bronzés, c’est vrai, Je l’ai vécu ! » s’exclame-t-il. « Le métier de G.O. comprend les notions de service, d’engagement, de transmission. Le temps est aussi un facteur important : le G.O. n’a pas de temps privé ».
Thierry Mosbah témoigne : « C’est vrai que j’ai le sentiment parfois d’être un G.O., d’abord en matière de relations sociales. Mais ma capacité à réussir des animations est aléatoire surtout quand il y a des grèves ! Je joue aussi le rôle de G.O. auprès des encadrants lorsque les tableaux de bord nécessitent un compromis, et auprès des 8 000 personnes du groupe, dont je ne connais qu’une partie ! »
Les DRH : acteurs ou instruments ?
Izy Béhar est partagé. Le DRH est une fonction support, très contrainte dans l’univers français par l’application des textes et l’obligation de négocier. Son rôle s’apparente finalement plus à la position de chef de village qui doit faire appliquer les règles. « Le DRH n’est pas assez dans la stratégie. Dans d’autres pays où le droit social est moins contraignant, le DRH se rapproche plus de la culture G.O. : celui qui transmet et rapproche des gens différents. »
Pour Thierry Mosbah, le DRH joue un rôle politique au sein du comité exécutif et doit influencer les décisions même si la position est difficile à tenir. Il a prioritairement pour mission de mettre en garde l’entreprise contre des visions pas toujours justes. Izy Béhar souligne le regard à la fois interne et externe du DRH, qui lui permet de donner des indications sur la façon de mener à bien des objectifs.
Antonella Desneux demande à Izy Béhar si la normalisation de la fonction RH ne risque pas, en créant des processus trop rigides, de laisser de côté les convictions et la dimension politique de la profession. Pour ce dernier, certaines normes sur la gouvernance humaine sont obligatoires et bénéfiques pour l’entreprise car elles alignent la performance sociale avec la performance économique.
Le DRH n’a pas le monopole du cœur…
Francis Mer fait remarquer avec force que le DRH n’est pas le seul à se préoccuper des hommes et des femmes au sein du comité exécutif !
Thierry Mosbah lui répond que le DRH est plus porteur de conscience que d‘autres, et qu’il se retrouve souvent en situation d’opposition. Izy Béhar confirme sa conviction que la culture RH n’est pas assez présente chez les grands dirigeants.
Pour Jean-Michel Garrigues, Directeur associé, en charge des RH et du Développement chez BLB Associés, le DRH doit être à la fois technique et politique dans une petite ou moyenne entreprise, mais dans un grand groupe sa fonction est uniquement politique. Une récente étude montre que 50% des DRH du CAC 40 n’ont jamais occupé de fonction RH auparavant, et ce chiffre s’élève à 80% pour les DRH du CAC 40 nommés en 2011-2012 ! « Ce phénomène est porteur de risque : ces DRH ne possèdent pas de culture RH : Toute ma vie je me battrai contre ça ! » tonne Jean-Michel, applaudi par la salle.
Sylvie Brunet, membre du CESE, constate le petit nombre de DRH présents dans les conseils d’administration. Pour y accéder ils doivent suivre une formation administrative, alors que les autres membres ne suivent pas de formation RH… Les sujets RH doivent être traités nationalement, afin d’ouvrir les portes des conseils d’administration aux DRH.
Selon Francis Mer, la gestion des hommes et des femmes dans une entreprise ne doit pas relever de la responsabilité d’une seule personne. Dans le monde de demain il faudra repenser la dimension de l’ensemble des RH.
En conclusion, Thierry Mosbah lance à l’assemblée « DRH, levez-vous et sauvez vos emplois ! »
Comment définir et diffuser une véritable culture RH ?
Du projet stratégique à la culture RH ou comment décliner un projet industriel en termes de stratégie RH monde !
Frédéric Périn, DRH du Groupe EGIS
Comment un groupe diffuse-t-il sa culture à l’international ?
Thierry Billion, Senior VP RH de CMA CGM
Frédéric Périn possède un profil atypique : philosophe de formation puis inspecteur du travail, il a occupé le poste d’Administrateur du Louvres. Il est actuellement DRH du groupe EGIS, qui conçoit et pilote la réalisation de grandes structures à travers le monde. A son arrivée dans le groupe, il trouve une situation pour le moins hétéroclite, constituée par le regroupement de plusieurs entités de provenances et de cultures différentes au sein de la CDC. En 2007, la direction pose un ultimatum aux différentes sociétés : soit elles arrivent à s’entendre, soit le groupe est vendu en appartements… « Il a fallu redéfinir la marque, repenser le périmètre des sociétés, mettre en œuvre un projet stratégique d’organisation » se souvient Frédéric Périn. Pour fonder ce projet commun, le groupe met en avant les notions d’humanité, de responsabilité et d’offre globale, illustrées par une nouvelle identité visuelle. « Ce projet, que j’ai piloté pendant deux ans, n’aurait pas été réalisable sans un dialogue très dense avec toutes les parties concernées : managers, cadres, représentants du personnel. En impliquant tout le monde et en redonnant de la cohérence au groupe, nous avons atteint l’objectif que nous nous étions fixé de doubler le chiffre d’affaires en cinq ans ».
Thierry Billion se définit comme un pur produit RH. Il a toujours travaillé pour des entreprises familiales. « Une entreprise familiale possède un driver fort, charismatique, actionnaire, ce qui facilite la mise en dynamique de la culture d’entreprise et sa transmission au sein même de la famille, dont seront issus les futurs dirigeants. »
Quelle place pour le DRH dans cette configuration ? « Le DRH n’a pas un rôle de pouvoir, mais d’influence. Il doit exercer son influence auprès du cercle décisionnaire, ce qui est faisable s’il est bon politique. Il ne doit pas se restreindre à un rôle d’expert » précise Thierry Billion.
Un groupe international doit se construire autour de valeurs fortes et reconnaissables. « Nous avons fondé notre cohésion autour des réalisations du groupe : elles sont visibles, tout le monde y participe, elles contribuent à l’amélioration des conditions de vie dans un pays. Elles constituent le fil conducteur transnational idéal » indique Frédéric Périn.
A la CMA CGM, société de commerçants, la valeur fédératrice est l’émotion. Le groupe encourage également le ‘think out of the box’ ou sortir du cadre, pour favoriser les initiatives. « La culture d’entreprise se diffuse grâce à des rites » nous dit Thierry Billion « le comité stratégique lundi, le comité exécutif mardi, la réunion commerciale vendredi,…Cela garantit le maintien du principe même de notre métier : la réactivité, qui permet d’optimiser au maximum les flux. »
Antonella Desneux leur demande de résumer la culture de leur entreprise en quelques mots : « une culture centrée sur le produit et son utilité sociale, alliée à une culture du développement » pour Frédéric Périn, « la culture de l’intelligence rationnelle » pour Thierry Billion. Et s’ils devaient emprunter un élément de la culture de l’autre ? « Sortir du cadre, car le milieu des ingénieurs, ce n’est pas toujours amusant ! » avoue le DRH d’EGIS « moi j’aimerais plus de cadre, car parfois c’est fatigant ! » lui répond le DRH de CMA CGM.
Conclusion de la journée
Francis Mer, Ancien Ministre, Président de la Fondation Condorcet, Vice-Président de SAFRAN
« On attribue plusieurs significations au R de RH » commence Francis Mer « Je n’aime pas le terme Ressources : l’Homme a des ressources, mais n’est pas une ressource. Le mot Relations convient mieux, et représente bien le cœur de toute collectivité. L’expression Richesses possède également du sens, car l’objectif du DRH consiste à cultiver et développer les richesses de chacun. A vous de choisir ! »
Selon Francis Mer, le DRH contribue à donner de la chair à la construction d’un droit de l’entreprise. Le capital humain n’est pas reconnu au même titre que les autres capitaux (financier, commercial, matériel, immatériel,…) de l’entreprise, alors que le succès ou l’échec d’une organisation dépend des femmes et des hommes qui la composent. Les pressions financières empêchent les directions de faire de la gestion des hommes une priorité.
Le monde vit d’énormes bouleversements causés par l’explosion démographique, l’explosion du savoir (les chercheurs n’ont jamais été aussi nombreux) et l’accès illimité et gratuit à la connaissance via internet. Le potentiel révolutionnaire du digital touche la planète entière et modifie les relations humaines et les rapports entre les différentes générations. L’approche du travail chez les jeunes est complètement changée.
« L’entreprise doit s’organiser pour tirer la meilleure partie de ces transformations et intégrer les générations montantes avec l’aide des générations plus anciennes » souligne Francis Mer. « Les DRH ont un rôle majeur à tenir pour aider les organisations à relever ce défi et conduire le changement. »
Pour affronter ces évolutions, l’organisation doit faire preuve d’audace et chercher des solutions directement auprès des collaborateurs. « Le personnel dispose de compétences et d’un savoir qui ne demandent qu’à être exprimés. Le DRH doit capter cette intelligence et la transformer en amélioration de la performance économique en mettant en place les actions nécessaires. Il doit rassurer les managers qui auront peur d’être remis en cause » conclut Francis Mer.
De Francis Mer à l’Amiral Lajous, la transition est aisée…
Le mot du Président
Olivier Lajous confirme qu’au Club DéciDRH on refuse le mot Ressource, lui préférant Richesse ou Rareté.
« Les cultures d’entreprise ont évolué vers un stress accru. La mondialisation, la numérisation et la mobilité complexifient l’entreprise et lui donnent une culture nomade. L’incertitude et la diversité grandissent. Ce ne sont pas des menaces, mais des richesses ! » rappelle-t-il.
Le temps est un facteur clef de l’humanité. « Prenons le temps de prendre le temps ! »
Il revient sur les mots importants de la journée « Responsabilité, courage, envie, liberté, confiance, autonomie, dialogue, collectif, partage, temps, initiative, créativité fierté, plaisir : tous ces mots mis en bouillabaisse nous permettront de construire l’entreprise de demain ! »
Les participants se sont ensuite rendus en petit train dans la demeure du gouverneur militaire pour une soirée en présence de Denis Masseglia, Président du COMITE NATIONAL OLYMPIQUE ET SPORTIF FRANÇAIS et Président du CERCLE D’AVIRON DE MARSEILLE, qui nous a présenté son dernier ouvrage «Le sport, c’est bien plus que du sport !»
VENDREDI 7 JUIN
Quels outils pour développer une culture RH ?
Le Leadership individuel, clé d’une fusion d’entreprise réussie
François Barenton, DRH France AKZONOBEL
Cyril Legrand, Chief Executive Officer and Regional Partner France, OXFORD LEADERSHIP ACADEMY
Nathalie Liebert, DRH de VWR International, membre du comité de pilotage de DéciDRH « représente la culture des PME au sein du Club ». Elle a accepté de tenir le rôle d’animatrice. « Mais j’avais précisé à Christophe : tout sauf la session du vendredi matin ! Me voilà pourtant devant vous… Nous avons parlé de G.O. hier. Pour vous réveiller, je propose une danse des crazy signs ! »
Et c’est ainsi que nous avons commencé la journée, debout à danser les crazy signs, avec Nathalie Liebert en G.O., sur l’air des Bronzés !
Après cette entrée en matière dynamisante, Nathalie Liebert nous propose d’écouter plusieurs retours d’expérience de développement de la culture RH, dans des contextes différents.
AkzoNobel, entreprise industrielle hollandaise leader mondial de la peinture et de produits chimiques de spécialité compte 50 000 salariés pour 15 Milliards de chiffre d’affaires.
En 2008, AkzoNobel rachète un de ses concurrents. « L’entreprise doit alors concilier deux cultures presque opposées : l’une basée sur le BTB et la décentralisation, l’autre sur le BTC et une forte intégration » indique François Barenton.
Mettre de la couleur dans la vie des gens
Le nouveau CEO définit une mission : mettre de la couleur dans la vie des gens. Mais il se confronte à ce choc des cultures. « Les hommes d’une entreprise sont le fruit de son histoire » indique Cyril Legrand. « Il a fallu mettre en place une culture nouvelle, basée autour de la raison d’être commune imaginée par le CEO, afin que la fusion ne devienne pas scission.»
AkzoNobel décide de déployer un programme de self managing leadership auprès de l’ensemble des salariés, pour leur apprendre un langage commun et les aider à devenir acteurs de la transformation de l’entreprise. « Ce programme, simple à mettre en œuvre, demande aux dirigeants d’avoir l’audace de donner une part de pouvoir supplémentaire à tous les niveaux de collaborateurs. Il permet au DRH de devenir un moteur de la transformation de l’organisation et du leadership et donne l’occasion de connaitre les collaborateurs de façon très privilégiée » s’enthousiasme François Barenton.
« Le leadership n’est pas une science mais plutôt un art », reprend Cyril Legrand. « Il s’inscrit dans la notion de libération de la parole, pour que chacun, du collaborateur au manager, se responsabilise, reconstruise du lien et redéfinisse sa relation avec lui-même et les autres à travers la conversation. La logique ‘bottom up’ aide à casser les dogmes ».
Ce programme initié en 2009 a duré deux ans et demi, et a été mené auprès de 30 000 collaborateurs dans une vingtaine de pays via des sessions de formation se déroulant en plein nature.
« Nous avons mesuré en interne un renforcement significatif de l’engagement des collaborateurs, un meilleur focus opérationnel et une cohésion solide malgré une économie difficile » résume François Barenton.
« Quels sont les points de vigilance à observer ? », lui demande Nathalie Liebert.
« Les coordinateurs internes doivent être bien préparés. Cette formation peut mettre en relief des difficultés personnelles, face auxquelles il faut savoir réagir.»
Les nouveaux arrivants sont formés à ce programme, et un SML 2 est en cours de discussion.
Comment customise-t-on une culture d’entreprise dans une organisation de franchisés ?
Ludovik Putaud, DRH de MONCEAU FLEURS
De la culture des fleurs à la culture RH
Monceau Fleurs est passé en moins de 20 ans de un à 500 magasins franchisés répartis dans sept pays et regroupant 2 500 salariés. « Je suis le premier DRH du groupe, qui ne connaissait pas la culture RH avant mon arrivée, » témoigne Ludovik Putaud.
En acquérant la marque Rapid’Flore, Monceau Fleurs s’est retrouvé avec deux sièges sociaux, deux centrales d’achats, deux agences de pub,…et deux cultures : le chic parisien pour Monceau Fleurs, le hard discount de fleurs dans des villes de province pour Rapid’Flore. « Il devenait urgent de finaliser la fusion, et de bâtir une culture RH commune » explique Ludovik Putaud, qui continue « Pour cela, Le DRH doit d’abord s’attribuer son territoire, expliquer son action, montrer de l’exemplarité et tenir ses promesses. Il doit ensuite mettre en place les basiques. »
Ainsi, après avoir externalisé la fonction paye, Ludovik Putaud crée une structure permettant la constitution d’une représentation du personnel et instaure le dialogue. Il participe aux conventions, se fait connaître auprès des directeurs de magasins. « Je leur parle en langage commerçant. La formation représente un des ciments du la culture d’entreprise. Je les convaincs de la nécessité de former leurs employés, pour un meilleur service et donc un meilleur rendement.»
Une enquête menée auprès des salariés révèle trois valeurs clefs : l’esprit d’équipe, la créativité et l’engagement, autour desquelles se construit la culture RH, renforçant le sentiment de fierté d’appartenance au groupe.
« Nous avons ensuite mis en place des outils de diffusion de cette culture : un intranet avec l’offre de formations, un journal interne, des pages sur des réseaux sociaux pour certains magasins, une hotline RH, un forum entre franchisés où nous intervenons parfois pour rectifier des erreurs ou compléter des informations. Nous avons ainsi pu formaliser le principe RH ».
Ludovik Putaud est aussi un adepte du « management de la pompe à bière ». « Les rituels, moments de convivialité, faces à faces sont indispensables. Au siège nous organisons un apéritif chaque vendredi afin d’échanger de façon informelle. »
La mise en place d’un processus de sensibilisation et d’accompagnement des danseurs dans leurs reconversions
Sylvie Masmejean, DRH du BALLET NATIONAL DE MARSEILLE
Emmanuelle Ramondetti, Administrateur de l’Ecole Nationale Supérieure de Danse de Marseille
« Je suis très heureuse que le secteur de la culture soit présent dans cette université de la culture RH, et serais encore plus heureuse que la culture RH soit présente dans le secteur de la culture ! » plaisante à moitié Sylvie Masmejean.
Les danseurs sont des sportifs de haut niveau, commençant très tôt leur formation. A 18 ans, ils sont déjà pratiquement professionnels. La fin de carrière de danseur intervient entre 35 et 40 ans. Au-delà d’un changement de métier, cela représente un changement de vie difficile à anticiper pour des personnes ayant consacré 30 ans de leur vie uniquement à leur art.
« Quand on a mis en place le programme de reconversion des danseurs, on s’est vite aperçu que leur manque de diplômes rendait cette reconversion difficile », commente Emmanuelle Ramondetti. « C’est pourquoi nous avons monté des partenariats avec les universités de Toulon et de Nice. Aujourd’hui l’école de danse comprend une centaine d’élèves de 6 ans jusqu’à niveau bac +3.»
L’arrêt de la carrière est longtemps resté un sujet tabou pour des danseurs qui ne vivent que pour la scène. Pour mettre en place un dispositif de reconversion, il a fallu d’abord instaurer la confiance. Ce dispositif comprend des entretiens annuels de développement professionnel, puis un bilan de reconversion à la suite duquel l’ex-danseur peut bénéficier d’une formation longue.
« Ce programme de reconversion a créé une dynamique de long terme » indique Emmanuelle Ramondetti. « Anticiper sa préparation de deuxième carrière est désormais entré dans les mœurs. L’AFDAS a même constitué un fond spécifique de formation pour la reconversion des danseurs, au niveau national. »
« Les danseurs sont des sportifs de haut niveau, peut-on établir un parallèle avec l’OM ? » demande Nathalie Liebert à Frédérique Alvérola, DRH de l’Olympique de Marseille, qui répond : « Nos joueurs sont en CDD, nous n’avons donc pas vraiment la main sur leur avenir. En revanche, nous avons du mal à faire comprendre à nos jeunes en formation qu’ils ne deviendront pas tous pros, et qu’ils doivent se préparer à ne pas devenir footballeurs. »
« Nous avons conçu des partenariats avec des lycées afin d’aménager les heures de cours de danse et le cursus scolaire. Nous faisons sans cesse passer le message aux élèves qu’il est aussi important de passer le bac que de réussir leur formation de danseur. Pour nous, c’est lié. Cela rassure aussi les parents » explique Emmanuelle Ramondetti.
La reconversion pourrait être contractualisée dès le début de carrière du danseur. « C’est une piste, mais cela demande un vrai engagement des politiques et de l’état. » conclut Sylvie Masmejean.
Culture d’entreprise – réseaux sociaux et marque employeur
La culture d’entreprise hors les murs grâce aux réseaux sociaux avec BLUEKIWI
Jean-Michel Vergne, Directeur des opérations de BLUEKIWI an ATOS COMPANY
Damien Douani, co-founder de FADA social Agency
Le choc digital ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise
« Les réseaux sociaux d’entreprise (RSE) ne sont pas seulement un véhicule de la culture d’entreprise » annonce Jean-Michel Vergne. « Le réseau social est d’abord un fait culturel qui s’impose à nous tous dans notre vie quotidienne et dans les entreprises. La révolution technologique a modifié notre façon de nous informer, de voyager, de nous rencontrer, de consommer. Nous vivons l’ère de l’homo numericus ».
Et de citer quelques chiffres pour illustrer ses propos :
- 2,3 milliard d’internautes dans le monde en 2012
- 1,5 milliard d’utilisateurs de réseaux sociaux dans le monde
- 1 milliard d’abonnés à Facebook dans le monde, 30 millions en France
- 30 minutes par jour de temps de connexion à Facebook
- 300 millions d’abonnés à Twitter dans le monde dont 5,5 millions en France
- 200 millions d’abonnés à Linkedin dans plus de 20 pays
- 47% d’entreprises utilisent Twitter
- 1 milliard de recherches par jour sur Google
- 1 000 milliards de vidéos postées par an sur Youtube
- La plus vue : 1 milliard de vues (Gangnam style)
- 6 nouveaux articles postés sur Wikipedia chaque minute
- 20 millions de personnes connectées par outils mobiles en France
- 1 couple sur 5 a trouvé l’amour sur interne en 2012
- 30% des divorces attribués à FB !
« Le fait que ce soit une révolution grand public explique que les organisations aient du mal à s’y retrouver » confirme Damien Douani. « Ce phénomène s’impose à elles ».
Le monde se dématérialise, il est possible désormais de se connecter ‘any time, anywhere, any device’. Internet a évolué selon plusieurs logiques : We tell you (information fournie aux internautes), puis You tell us (information cherchée par l’internaute, comme sur Google) et désormais You tell you (information échangée entre internautes).
L’entreprise doit faire face aux nouvelles attentes et habitudes de ses collaborateurs, qui utilisent dans leur vie quotidienne de meilleurs outils technologiques que ceux qu’elle leur fournit. Elle doit prendre à son compte ces technologies grand public et les utiliser pour améliorer sa performance économique. Ainsi, ATOS, qui a racheté BlueKiwi il y a un an, s’est fixé comme objectif 0 email en 2014. Tous les collaborateurs échangeront et partageront les informations via des plateformes collaboratives.
« Le réseau social d’entreprise permet la diffusion et le partage du savoir en interne comme en externe avec les clients, fournisseurs, partenaires…Il donne à l’entreprise une culture d’ouverture et de modernité. Le DRH est un acteur clé de l’exploitation de ces technologies au profit de l’entreprise, puisqu’elles se situent au cœur de la capitalisation des relations humaines » souligne Jean-Michel Vergne.
« Les RSE et les médias sociaux (Facebook, Twitter, Linkedin,…) se nourrissent les uns les autres » ajoute Damien Douani. « Chaque outil correspond à un usage et à un objectif. L’entreprise doit raisonner dans une logique constellation et se placer au centre de cette constellation technologique ».
La politique de recrutement de l’armée de terre au travers des réseaux sociaux
Lieutenant-colonel Eric de Lapresle, Bureau marketing et communication de recrutement de l’ARMEE DE TERRE
L’armée de terre, qui compte 130 000 personnes civiles et militaires, recrute 10 000 jeunes par an. Pour atteindre cet objectif elle doit rentrer en contact avec 120 000 d’entre eux et utiliser la communication comme une arme pour combattre leur attentisme et leur méconnaissance de l’armée de terre. Internet représente le dénominateur commun permettant d’atteindre le jeune chez lui.
« La page Facebook de l’armée compte 300 000 fans, avec des pics de 25 000 personnes qui en parlent en période de publicité, 5 000 en période normale. Nous avons une équipe dédiée 7/7 et 24/24, formée en technologie et en RH, qui a pour mission de répondre immédiatement à chaque message. Si on ne répond pas tout de suite, on perd le contact » explique le lieutenant-colonel Eric de Lapresle.
Cette équipe suit en permanence les médias sociaux afin de repérer et de répondre aux questions posées sur l’armée.
Le site de l’armée, qui doit pouvoir attirer et accrocher le jeune, bénéficie d’un pôle éditorial performant comprenant huit personnes dédiées.
Une session de tchat se déroule une fois par semaine de 18h00 à 22h00, afin d’échanger avec les jeunes.
L’armée de terre, une entreprise comme une autre ?
« Les générations d’avant n’aimaient pas tellement cette appellation d’entreprise » rappelle le lieutenant-colonel. « Mais les jeunes ont besoin de visibilité sur l’armée de terre pour la comparer aux entreprises privées ».
L’armée travaille déjà à sa campagne de communication 2016-2019. Le web intelligent sera au centre du dispositif, avec la création d’un avatar, le caporal Dupont, capable de répondre à toutes les questions.
Particularismes et diversités des différentes cultures RH
Les cultures des pays du nord de l’Europe
Hanna Vaaranen, VP RH d’EURENCO FRANCE – GROUPE SNPE
Thierry Mosbah, DRH de SERIS Security, Marseillais et animateur de la session, nous présente Hanna Vaaranen, « Finlandaise, une voyageuse venue du froid, interprète reconvertie aux RH ».
« En ce moment il fait 30°C en Laponie, alors qu’il fait 10°C à Paris ! » réplique Hanna Vaaranen qui, travaillant depuis plus de 20 ans en France, nous présente un panorama des différences culturelles qu’elle a remarquées entre les pays nordiques et la France.
Illustrant ses propos par l’extrait du film « Au loin s’en vont les nuages », elle nous explique que les nordiques expriment peu leurs sentiments, que ce soit par la parole ou leurs expressions. Ils peuvent paraitre très calmes même en proie à un grand stress.
La culture finlandaise est caractérisée par l’influence de ses deux grands voisins, la Russie et la Suède. Fréquemment menacé d’invasion par la Russie, le finlandais a appris à devenir un très bon soldat, défenseur de son territoire. Il vénère la nature. L’esprit des finlandais est résolument tourné vers l’avenir, ce qui leur donne une attitude très positive devant la modernité. Pour eux le meilleur est devant. Ils suivent les principes du « Sesu », notion qui symbolise le courage et la persévérance, et sont très respectueux des règles. La société finlandaise a depuis longtemps donné une place solide à la femme : c’est le deuxième pays au monde à avoir donné le droit de vote aux femmes en 1906.
Conceptualisation vs pragmatisme….
Comment cela se traduit-il dans le monde du travail ? « En France, on débat beaucoup des concepts dans les réunions. La maitrise de la vision globale et du sens du détail m’ont toujours beaucoup frappé. Malgré cette intellectualisation à outrance, le système est efficace ! Dans les pays du nord où le pragmatisme prévaut, les réunions servent uniquement à trouver des solutions » indique Hanna Vaaranen. « Autres différences caractéristiques des pays nordiques : la décision finale n’appartient pas à un chef, mais passe par un consensus. Le management est d’emblée basé sur la confiance, alors qu’en France il faut d’abord construire cette confiance, qui n’est pas acquise. Le respect des règles se retrouve dans les entreprises. Concernant les relations sociales, les partenaires sociaux acceptent les lois de l’économie de marché. Un trait que nous avons en commun avec les asiatiques, les finlandais ont une peut bleue de perdre la face ! »
La différence France Allemagne commentée
Ralf Gottwald, Directeur Comp & Ben, Audit, Reporting, VEOLIA TRANSDEV
Selon Ralf Gottwald, « Le bagage culturel ne se transporte pas facilement. L’UNESCO définit la culture comme la somme des habitudes d’une organisation. Cela peut tourner en rond ! ». La culture doit se remettre en question, afin de ne pas emprisonner une organisation dans des traditions et des fonctionnements. A l’image du monde, la culture doit être dynamique et s’adapter.
La culture mange la stratégie au petit-déjeuner
« La culture mène la stratégie » rappelle Ralf Gottwald. « Elle agit parfois comme un système immunitaire, en expulsant les corps étrangers. Il faut repenser le modèle, notamment dans un cadre transnational ».
Concernant les différences France – Allemagne : « En Allemagne, la prise de décision se fait de façon collégiale alors qu’en France le dirigeant la prend seul. Aucune décision ne peut passer sans la validation du CE, en France cet avis est consultatif. Le chef d’entreprise a tout pouvoir en France, en Allemagne on fonctionne plus par co-détermination. Le collaborateur français a plutôt tendance à travailler seul, les allemands privilégient le travail d’équipe. En France on pratique le culte des heures, sans prendre en compte la productivité. En Allemagne, si on est encore présent à 19h00, c’est plutôt par manque d’organisation… »
La culture des 3 fonctions publiques
René Picon-Dupré, Contrôleur Général des Armées, MINISTERE DE LA DEFENSE
Enarque, agrégé de lettres, civil détaché dans une entité militaire, René Picon-Dupré possède une vaste connaissance de la fonction publique, ou plutôt des trois fonctions publiques : d’Etat (2 millions de personnes), territoriale (1,4 million de personnes), hospitalière (1,1 million de personnes).
Selon lui, « Il n’existe par une, mais des cultures de la fonction publique, même si l’on retrouve des règles communes aux trois entités, comme le statut légiféré du fonctionnaire, les accès par concours ou encore le système des grades.»
Ces fonctionnements eux-mêmes évoluent. Le recrutement ne se fait plus seulement sur concours. La notion de prime au mérite et aux résultats se met en place. Les DRH se font de plus en plus présents dans certaines instances qui leur étaient fermées il y a peu. « A terme, la fonction publique va se rapprocher du fonctionnement du secteur public » analyse René Picon-Dupré.
« Mais les règles et les statuts ne suffisent pas à créer une culture » insiste René Picon-Dupré. « Chaque fonction publique possède sa propre approche. La culture diffère d’un ministère à l’autre, ou d’une armée à l’autre ! »
Les cultures RH de MARSEILLE « avé l’accent »
Frédérique Alverola, Directeur RH de l’OLYMPIQUE DE MARSEILLE
Philippe Alchus, RRH de RICARD
Nicolas Chabert, PDG de PERFEO, Membre du comité national du Centre des Jeunes Dirigeants. Ex Président du CJD Marseille.
Sylvie Brunet, Vice-Présidente ANDRH, Membre du Conseil Economique Social et Environnemental
« Parole à Marseille ! » s’exclame Thierry Mosbah, qui nous donne une petite astuce de la culture à Marseille : « en matière de circulation, on peut tout se permettre, dès lors qu’on dit merci avant de faire sa manœuvre… »
La Marseillitude
Frédérique Alverola 100% marseillaise, a intégré l’OM il y a 15 ans. Elle a inventé un concept : la « Marseillitude » ! « Il faut connaître ce concept pour travailler à Marseille. C’est un état d’esprit. A l’OM, nous côtoyons les salariés bien sûr, mais aussi tous les gens qui gravitent autour de l’équipe, comme les fans et les bénévoles. Cela fonctionne beaucoup par relation et amitié. Il ne faut surtout pas être rigide si l’on veut obtenir des résultats. »
Philippe Alchus approuve « Paul Ricard disait : fais-toi un ami par jour ! Cette phrase est restée comme l’objectif managérial, commercial et RH du groupe. Convivialité et simplicité sont des mots clefs chez Ricard. »
Pernod Ricard, deuxième groupe mondial de spiritueux, compte 18 000 salariés dont 900 chez Ricard, pour un CA de 470 millions d’euros. 300 personnes travaillent au siège à Marseille, situé toujours au même endroit depuis sa fondation par Paul Ricard. « Pastis signifie mélange en provençal. Adolescent, Paul Ricard a vu les tenanciers de bar faire leur pastis. Il a inventé sa propre recette et l’a commercialisée » raconte Philippe Alchus.
Nicolas Chabert représente une petite entreprise du digital basée à Marseille. « La culture d’entreprise est essentielle, même dans une petite structure. La nôtre s’est construite autour de deux valeurs, le principe ‘dire ce qu’on fait et faire ce qu’on dit’, et le jeu collectif. Nous organisons souvent des parties à la plage le vendredi soir. 80% des effectifs sont présents. Ces moments de détente contribuent à souder l’équipe ».
« Après la Marseillitude, la marque phare et la PME, passons à l’expérience de Sylvie Brunet », propose Thierry Mosbah.
« Marseille est un endroit de passion » déclare Sylvie Brunet, « une ville très affective, où l’on peut rencontrer aussi de forte inimitiés. Son tissu économique se compose à 95% de TPE et PME. Marseille possède une culture d’innovation, de diversité et de créativité. De nombreux créateurs et marques vivent et ont vu le jour ici. Stéphane Brousse, président du MEDEF PACA, a conçu des dispositifs très innovants comme Expert Inside qui propose aux petites entreprises la mise à disposition d’un RRH à temps partiel selon leurs besoins. Marseille possède également un des meilleurs pôle d’immunologie mondiale. Nous avons connu aussi de gros conflits avec les syndicats, mais nous avons de moins en moins de grèves. Tout ça c’est Marseille. Sans oublier l’OM ! »
« C’est vrai qu’on est obligé d’être créatif à Marseille pour se garer… » fait remarquer Thierry Mosbah.
La culture Ricard, sinon rien
« Aucun jour de grève en 80 ans chez Ricard ! » se réjouit Philippe Alchus. « Nous avons construit un modèle social gagnant-gagnant. Les journées sont parfois difficiles, les collaborateurs sont présents à Noël ou le week-end, mais la solidarité est très forte. Paul Ricard a toujours voulu que ses employés partagent les résultats de l’entreprise. Cela se traduit en chiffres : 22 jours de RTT, 34,20 heures par semaine, salaires axés sur les résultats d’entreprise, intéressement et participation pouvant aller de à 3 mois et demi jusqu’à 6 mois, un peu moins de 4% dans le CEE. Un centre de vacances est à la disposition exclusive des salariés de Ricard. »
Le mot de clôture du Président
« S’il ne devait y avoir qu’une seule culture, que ce soit celle de l’humain ! » s’exclame Olivier Lajous, avant de remercier les intervenants de l’université. « Le DRH doit s’imprégner de l’autre, avoir le goût de la diversité, de la liberté, de l’équité et aussi de la complicité, qui implique d’aimer l’autre. Osons utiliser dans notre métier les mots entendus aujourd’hui, comme courage, respect, persévérance, confiance, pragmatisme et passion. Ayons le sens et le goût de l’autre ! »
Merci et à bientôt !